Inauguration du projet de pâturage d’intégrité écologique à buffles d’eau à Mensdorf (zone protégée 'Schlammwiss Brill') en présence de Joëlle Welfring et Claude Haagen

À l’instar de la perte continue de la diversité biologique, la nécessité de trouver des concepts innovants pour combiner la protection des espèces avec une exploitation agricole respectueuse de la nature ne cesse d’augmenter. Dans la zone protégée «Schlammwiss Brill» – une des plus importantes zones de protection pour les oiseaux migrateurs ­– un tel projet a été réalisé grâce à un animal domestique peu commun au Luxembourg, le buffle d’eau. Dès la renaturation de la Syre en 2003, qui rétablissait une panoplie de biotopes du milieu humide, séquestrant du carbone, le pâturage extensif servait comme méthode principale pour gérer les prairies humides du «Schlammwiss Brill». Les sols humides et argileux étant particulièrement sensibles au lourd poids des grandes machines agricoles, un pâturage dit «d’intégrité écologique» garantit une gestion douce de la végétation, tout en respectant les oiseaux nicheurs, leur proie principale, des insectes, ainsi que les nombreux amphibiens qui habitent la zone protégée.

 

De gauche à droite: Jean-François Wirtz (Bourgmestre commune de Betzdorf); Joëlle Welfring (Ministre de l'Environnement, du Climat et du Développement durable); Claude Haagen (Ministre de l'Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural)
©MECDD

Les 15 buffles d’eau, dont la race est originaire des Carpates ukrainiennes et roumaines, pâturent sur une surface de 23 hectares depuis 2021. Les premiers résultats positifs pour la biodiversité ont déjà pu être observés après deux ans. En effet, les buffles sont des vrais ingénieurs d’écosystèmes: le troupeau a créé de nombreuses petites mardelles (des mares de petites tailles qui se remplissent naturellement d’eau, qui sont utilisées par les buffles pour s’y vautrer). Ces mardelles déclenchent une véritable cascade en faveur de la biodiversité: elles attirent les amphibiens qui y posent leurs œufs, des oiseaux limicoles qui y cherchent des invertébrés et des hirondelles qui en collectent la boue pour la construction de leurs nids. Les prairies humides de leur part profitent d’une dynamique naturelle: la grande biomasse d’herbe, présente jusqu’en septembre, qui est avantageuse pour les insectes, est réduite progressivement par les buffles jusqu’en mars de l’année suivante, donnant une opportunité pour des nouvelles plantes de germiner, sans compétition excessive par des herbes graminées. Ainsi, des fleurs de la liste rouge et le populage des marais et les iris des marais ont pu étendre leur présence significativement. Les bouses des buffles, à leur tour, attirent de nombreux insectes coprophages, dont le très rare scarabée Aphodius satellitius, dont la première détection au Luxembourg a été enregistrée dans une bouse de buffle à Mensdorf en 2021.

 

En tant que porteur principal du projet, l’Administration de la nature et des forêts (ANF) a collaboré avec de nombreux partenaires pour réinstaurer un nouveau projet de pâturage, dont l’Administration de la gestion de l’eau (AGE), l’Administration des services techniques de l'agriculture (ASTA) et le SIAS. La commune de Betzdorf et la Fondation «Hëllef fir d’Natur» sont, à côté de l’État, les propriétaires principaux du terrain. S’y ajoutent des terrains de la commune de Niederanven et de Schuttrange, ainsi que quelques propriétaires privés. En 2020, l’ANF avait lancé un appel à candidatures afin d’identifier un nouvel exploitant agriculteur pour prendre en bail les terrains humides de la Syre renaturée, dont l’exploitation peut parfois s’avérer aventureuse. C’est l’agriculteur biologique Alex Mehlen de Manternach qui a été retenu comme exploitant du «Menster Brill» et responsable ultime du bien-être des buffles. De nouvelles infrastructures, financées par le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable (MECDD), dont des clôtures, un abri et un nouvel abreuvoir, complètent le bien-être animal sur le site. Les habitants de Mensdorf, de leur part, se réjouissent des nouveaux gardiens charismatiques du «Menster Brill». L’autopédestre, qui entoure le pâturage, offre des belles vues sur le projet. Avec un peu de chance, lorsque les températures dépassent les 20 degrés, on pourra observer les buffles pendant les baignades dans les mares nouvellement installées près du village de Mensdorf. Vu les résultats prometteurs de ce concept de pâturage extensif, le MECDD a l’intention de promouvoir le pâturage à buffles sur d’autres sites renaturés.

 

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